Corruption en hausse : la Cour des comptes réclame un renforcement des poursuites pénales

  • décembre 13, 2025
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Corruption en France : Un état des lieux accablant

La corruption en France n’est pas un phénomène anodin. Les dernières années ont vu une montée significative des faits enregistrés, révélée par la Cour des comptes dans un rapport approfondi de près de 120 pages. Pour l’année 2024, bien que la police et la gendarmerie aient déjà relevé des cas, ceux-ci ne représentent qu’une minorité des procédures engagées.

EN BREF

  • En 2022, 191 000 personnes ont été exposées à la corruption dans leur milieu professionnel.
  • Les infractions liées à la corruption ont augmenté de 51 % entre 2016 et 2024.
  • La Cour des comptes appelle à une réforme pour améliorer la lutte contre la corruption.

La Cour des comptes a souligné que les faits de corruption signalés s’appliquent uniquement aux cas ayant fait l’objet d’une plainte ou d’une constatation officielle. En effet, en 2022, 191 000 personnes ont été confrontées à la corruption dans leur environnement professionnel, selon des données alarmantes qui interpellent sur l’étendue du phénomène. Le rapport indique un nombre croissant d’atteintes à la probité, avec 934 infractions recensées, soit une augmentation de 8,2 % par rapport à l’année précédente.

Parmi ces infractions, les faits de corruption représentent 35 %, suivis de la prise illégale d’intérêts (21 %) et du détournement de fonds publics (18 %). Cette hausse est également visible dans les activités policières, qui montrent une progression de 51 % depuis 2016 jusqu’à aujourd’hui, témoignant d’une meilleure reconnaissance de la corruption par les forces de l’ordre.

Zones géographiques les plus touchées

Le rapport souligne des zones particulièrement sensibles, comme les départements et territoires d’Outre-mer, la Corse, la Provence-Alpes-Côte d’Azur et certaines communes en Occitanie et à Paris. En effet, contrairement à d’autres types de délits, la corruption semble concentrée géographiquement, touchant des communes de toutes tailles de manière quasi homogène.

En revanche, le nombre de condamnations pour atteinte à la probité est resté stable au cours des 15 dernières années, oscillant entre 300 et 400 par an. Cette stabilité contraste avec l’augmentation marquée des faits signalés par les forces de police. Entre 2017 et 2019, plus de 90 condamnations concernaient des infractions liées au trafic de stupéfiants, représentant presque 10 % des condamnations total, soit une hausse visible par rapport aux périodes antérieures.

Un cadre juridique insuffisant

Malgré l’existence d’un cadre juridique solide, la lutte contre la corruption demeure entravée par une série de facteurs, notamment l’absence de mesures de transparence et la méfiance grandissante des citoyens à l’égard de la classe politique. La Cour des comptes recommande ainsi un renforcement des outils de mesure et d’analyse de lAgence française anticorruption.

Le cadre législatif en matière de lutte contre la corruption a évolué entre 2013 et 2024 avec l’introduction de lois comme celle de Sapin 2. Celles-ci, bien qu’efficaces, ont engendré un système complexe, pesant financièrement sur l’État avec un coût direct d’au moins 22 millions d’euros et 170 postes dédiés.

Appel à l’action

La Cour des comptes insiste sur la nécessité de professionnaliser le traitement pénal des atteintes à la probité. Actuellement, les accusations de corruption font face à des sanctions limitées dans le secteur public. Les institutions telles que l’Agence française anticorruption (Afa) doivent renforcer leurs dispositifs pour garantir un meilleur suivi des infractions.

Pour la chaîne pénale, il est préoccupant de noter que 53 % des dossiers transmis aux parquets ne donnent pas lieu à des poursuites. Les délais de traitement sont également inquiétants, s’élevant à 6,1 ans en première instance et 8,3 ans en appel, avec un faible taux de condamnations.

En réponse au rapport, le ministre de la Justice a déclaré qu’il était observé une augmentation du nombre de condamnations dans des affaires de corruption depuis 2020, avec un nombre record de 78 condamnations prononcées en 2024. Toutefois, la Cour des comptes appelle à une gouvernance plus claire pour le nouveau plan de lutte contre la corruption prévu pour la période 2025-2029.

Vers une meilleure gouvernance anticorruption

Les nombreux acteurs impliqués dans la lutte anticorruption en France, tels que l’Afa, la HATVP et le CNNCF, illustrent un paysage complexe. La Cour des comptes plaide pour une consolidation de ces rôles autour de l’Afa, afin de clarifier les responsabilités et d’optimiser l’action publique anticorruption.

En somme, bien que la France dispose d’outils puissants pour combattre la corruption, il reste un besoin urgent d’améliorer la stratégie politique afin de maximiser leur efficacité.