
La Commission européenne a ouvert, ce jeudi 9 octobre, une enquête sur des allégations d’espionnage dont la Hongrie serait à l’origine. Ces faits se seraient déroulés entre 2012 et 2018, durant lesquels le gouvernement de Viktor Orbán, en place depuis 2010, aurait cherché à infiltrer ses ressortissants travaillant au sein des institutions européennes, notamment à Bruxelles. Cet article s’appuie sur une enquête journalistique internationale qui dévoile les tenants et aboutissants de cette opération.
EN BREF
- La Hongrie est accusée d’avoir mené une opération d’espionnage au sein des institutions européennes.
- Des faux diplomates auraient tenté d’influencer des fonctionnaires hongrois à Bruxelles.
- Le gouvernement hongrois rejette ces allégations, dénonçant une campagne de diffamation.
Les accusations : une opération d’espionnage à Bruxelles
Selon les investigations menées par le média hongrois Direkt36, en collaboration avec des publications respectées telles que Der Spiegel et Der Standard, la Hongrie aurait mis en place un dispositif d’espionnage visant des fonctionnaires européens d’origine hongroise. Le but de cette opération était d’accéder à des informations confidentielles et de tenter d’influencer les documents émanant de la Commission européenne.
Les journalistes impliqués affirment que Budapest considérait tout employé hongrois à la Commission comme une “cible”, à même d’apporter des informations d’un intérêt stratégique. Les agents chargés de cette mission auraient opéré sous couverture diplomatique, à partir de la représentation permanente de la Hongrie à Bruxelles.
Les méthodes présumées : faux diplomates et pressions sur les employés
L’enquête révèle que de faux diplomates ont approché ces fonctionnaires avec des propositions de fuite d’informations sensibles ou de modification de rapports. Un témoignage recueilli par Direkt36 rapporte qu’un agent aurait demandé : “Réécris ceci, supprime cela”, visant à garantir que “les textes reflètent la vision du monde du gouvernement Orbán”.
Ces activités auraient été particulièrement actives durant la période de 2012 à 2018, lorsque la représentation hongroise auprès de l’UE était dirigée par Oliver Varhelyi, qui est devenu commissaire européen en 2019. L’enquête suggère qu’il était au courant des opérations d’espionnage et aurait bénéficié des informations collectées pour exercer des pressions sur les employés en échange d’avantages financiers ou professionnels. Néanmoins, le rapport ne précise pas si ces tentatives ont effectivement porté leurs fruits.
Les réactions : entre enquête interne et démentis fermes
Face à ces allégations, la Commission européenne a déclaré qu’elle prenait ces accusations “très au sérieux”. Son porte-parole, Balazs Ujvari, a annoncé la création d’un groupe interne visant à examiner la situation et à renforcer la sécurité tant du personnel que des systèmes d’information. “C’est une question de sécurité”, a-t-il souligné, confirmant que la Commission était déterminée à “protéger ses informations contre toute collecte illicite”.
Du côté de Budapest, les autorités ont immédiatement rejeté ces accusations. Le porte-parole du gouvernement, Zoltan Kovacs, a dénoncé sur le réseau social X ce qu’il qualifie de “campagne de diffamation orchestrée par des services de renseignement étrangers”, insinuant qu’un journaliste hongrois aurait même participé à cette action.
Le contexte : une relation tendue avec Bruxelles
Ces accusations interviennent dans un climat de méfiance croissante entre la Hongrie et l’Union européenne. Depuis son retour au pouvoir, Viktor Orbán est régulièrement critiqué pour des atteintes à l’État de droit, la liberté de la presse et l’indépendance de la justice. Ces dernières années, Bruxelles a introduit plusieurs procédures disciplinaires contre Budapest, entraînant le gel de milliards d’euros de fonds européens.
En 2024, la Hongrie a inauguré à Bruxelles une “Maison hongroise”, présentée comme un centre culturel. Toutefois, certaines instances belges de renseignement perçoivent ce projet comme un potentiel outil d’influence politique, accentuant ainsi les tensions existantes.
La situation actuelle exhorte à une vigilance accrue sur le respect des normes et principes européens, tant de la part des États membres que des institutions. Les allégations d’espionnage font ressortir une dynamique complexe entre la Hongrie et l’Union européenne, laissant présager un futur où la confiance devra être soigneusement reconstruite.